Dimanche 21 janvier
« La prochaine frontière, c’est à la nage que nous la passerons ! » Je me souviens de cette phrase lancée en réponse à un mail de bloggeur après notre passage catastrophique entre le Vietnam et le Laos. Aujourd’hui j’en souris… Non, n’essayez pas de nous imaginer traversant le Mékong à la nage avec nos sacs sur la tête et nos deux « lutins voyageurs » accrochés à nos dos 😊 – quoique que cela pourrait faire l’objet d’un article plutôt prisé ! – nous avons préféré un passage tout en douceur cette fois, deux jours en bateau traditionnel sur le Mékong pour rejoindre Chiang Kong en Thaïlande, tout en douceur je vous ai dit !
De l’embarcadère de Luang Prabang, plusieurs compagnies proposent ce type de croisière permettant de rejoindre Houay Xai. C’est avec la compagnie Shompoo Cruise que nous choisissons de passer nos dernières heures laotiennes. « Two days very unique and relaxing ! » Nous avons déjà entendu cela il n’y a pas longtemps… Mais « relaxing » voulait dire marche et pagaie la dernière fois ! (cf notre dernier article sur NamOu river aventure).
Ces deux jours seront à la hauteur de ce que l’on espérait « merveilleusement beau et relaxant », on ne peut rêver meilleure façon pour faire les 450 kms qui nous séparent de notre prochaine destination, en bus il nous en aurait coûté 15h ; alors oui ce confort a un prix, 120$ par personne, et 1/2 tarif pour les enfants ; au final nous paierons 300$ pour nous 4.
Le premier jour, petit déjeuner français à bord, arrêt à la grotte de Pak Ou – la grotte aux 1 000 bouddhas sacrés – et bain de soleil l’après-midi au fil de l’eau. Trop dure la vie !!
C’est le matin du deuxième jour qui restera pour moi le plus marquant. Quand le guide nous explique que nous nous arrêtons dans un village traditionnel kamu dans quelques minutes, nous ne sommes pas vraiment emballés à l’idée d’aller voir ce village ; non pas que découvrir ces peuples ne nous intéresse pas mais à l’idée que chaque jour, chaque semaine, le bateau s’arrête dans ce même village nous fait penser que son authenticité sera mise à mal…
Ludo et Jonas restent à bord tandis qu’avec Lily nous suivons le groupe. A notre arrivée, une troupe d’enfants est descendue et tous attendent là sur la plage… Au premier coup d’œil, nous comprenons très vite que leur niveau de vie est bien inférieur à celui d’autres villages que nous avons déjà vu. La plupart des enfants sont vêtus avec des… j’aurai envie de dire « guenilles » tellement leurs habits sont usés. En montant jusqu’au village, une petite fille nous suit, elle a l’air si jeune, je lui propose de lui donner la main pour l’aider à avancer mais quand je vois l’état de ses bras, j’ai une peine immense. Sa peau est boursouflée et saigne à des endroits. Je sens que la visite s’annonce difficile émotionnellement…
Lily me suit, je la regarde, elle ne dit rien et prend des photos. A peine descendues du bateau, nous avions gonflé quelques ballons, les sourires et les rires sur la plage avaient donner un peu de légèreté, les ballons nous ont suivi ! Certains enfants les tiennent précieusement contre eux, d’autres jouent avec en riant. « On aurait dû en amener plus des ballons maman, regarde comme ils sont contents ! » Nous aurions dû amener tellement plus de choses ici pensais-je…
Au retour sur le bateau, nous questionnons le guide avec un autre voyageur australien sur la possibilité de laisser un peu d’argent au village pour leurs permettre d’acheter des produits de premières nécessités. « Clothes and books are better ! » nous répond-il. C’est sur ces quelques mots et devant ces petits regards touchants que nous quittons un peu plus le Laos.
16h – Le bateau accoste à Houay Xay, un court trajet jusqu’au pont de l’amitié et notre guide nous dépose devant le poste frontière. Une aventure prend fin pour laisser place à la prochaine…
Mais avant, quel est notre ressenti sur le Laos ? Comment avons-nous vécu ce gros mois passé ici ? Qu’en avons-nous pensé ?
Il me vient tout de suite à l’idée cette phrase que nous avions écrite à notre arrivée « Laos, charme-nous, Laos régale-nous, Laos enivre-nous… »
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Charmés, nous l’avons été !
Que l’on sillonne les routes du Sud ou celles du nord, les paysages sont tout aussi splendides ; la beauté des alentours, une nature par endroit restée sauvage, nous fait vite oublier les trajets tortueux pour relier Vientiane à Nong Khiaw ; le trajet le plus terrible étant tout de même celui de Vang Vieng à Luang Prabang !
Note pour la prochaine fois (ou pour les autres voyageurs) : penser aux sacs – beaucoup de sacs – au bracelet spécial nausée, à l’huile spéciale nausée, aux granules, bref à tout ce que l’on peut trouver spécial route « qui fait que tourner » comme disent les enfants.Â
Charmés, nous l’avons été aussi par la gentillesse des habitants et des rencontres ici ; dès notre arrivée sur Pakse, c’est avec Noi que nous avons été comblé – bon ok elle est thaïlandaise à la base – mais elle a décidé de venir vivre ici au Laos alors c’est pareil ! Puis Bountien, notre guide à Tad Lo, quelle gentillesse ! Et Captain Hook, un personnage aussi surprenant qu’accueillant, sans oublier Siy, le gérant du Aussi Bar sur Vang Vieng, une perle ; et celui de Nong Khiaw au QBar, toujours une phrase gentille et ce sourire ; j’allais oublier la coiffeuse de Jonas à Luang Prabang… La coiffeuse tellement attentionnée de Jonas 😉
Charmés par cette douceur de vivre… En mode laotienne ! ‘Lonely’ dit « Le Laos est un pays où votre pouls bat moins fort », c’est tellement vrai ! C’est Noé rencontré sur Vang Vieng qui nous a résumé le mieux cette vie laotienne : quelques poulets, des canards, du riz et ils sont heureux ! De temps en temps quand ils gagnent un peu d’argent, ils achètent quelques bières, ils font une fête en famille et voilà !  Une vie simple. Â
Une vie simple comme leur langue ; « vous aimeriez la conjugaison ici » avait soufflé Noé aux enfants. Pour faire le futur, c’est simple tu ajoutes « si » devant le verbe ; pour le passé, tu mets « leo » à la fin de ta phrase. Et si tu veux poser une question tu dis « bo » à la fin de ta phrase ! Lily me regarde et sourit, elle doit penser à son passé composé 😉 !
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Régalés, nous l’avons également été !
 Certains disent que la cuisine laotienne n’est pas aussi diversifiée et sophistiquée que la cuisine thaïlandaise ou vietnamienne ; nous pouvons pourtant vous assurer y avoir très bien mangé! Notre trou dans le budget mensuel en preuve… 😉
Il suffit de prendre son temps pour découvrir ses diverses spécialités et en apprécier ses saveurs comme le Là ap – l’un des plats les plus courants ici – une salade composée d’un hachis de viande, de volaille ou de poisson agrémenté de jus de citron vert, de riz gluant grillé et pillé, de feuille de menthe et de piments, un délice !
Au petit-déjeuner, oubliez la baguette et le croissant, et préférez un pho, leur soupe de nouille de riz traditionnelle, elle est presque toujours servie avec une assiette de laitue, de menthe, de basilic, de germes de soja et de quartier de citron vert à ajouter à la soupe ; que de saveurs ; enfin tout dépend où on la mange !
« Non mais ils sont exceptionnels ces laotiens ! » je me souviens de notre surprise devant notre premier barbecue à 7h du matin ! Oui 7h le matin, même pas peur 😊 A chaque coin de rue, nous croisons un barbecue improvisé quand ce n’est pas sur les tables de restaurant qu’il est directement posé. Ah le barbecue laotien… Quelle belle expérience ! La première fois à Pakse, ce fut un vrai flop… Nous avions bien essayé d’observer autour de nous comment les laotiens s’y prenaient mais je vous assure que c’est tout un process ce barbecue laotien ! C’est grâce au très gentil serveur du QBar de Nong Khiaw que nous dégusterons ce fameux barbecue dans les règles de l’art, un festin à l’unanimité !
Je ne peux aussi oublier, dans la partie découverte gustative, mes fameuses fourmis… « Non mais maman, tu plaisantes, tu ne vas pas manger ces fourmis… ! Tu as déjà mangé un Å“il de poisson en Indonésie, ça suffit !! » m’avait crié Lily dans le village de Mr Hook. « Ecoute, Captain Hook dit que les fourmis ont des vertus digestives et qu’elles sont très citronnées, alors pourquoi pas ! » Il avait raison – du moins pour le goût citronné – c’est comme si on croquait dans un citron quand on les mâche ; côté digestif, je ne peux vous assurer ses dires…
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Enivre-nous lui avions nous demandé… Le Laos a rempli son contrat !
Loin des villes, on sort rapidement des sentiers battus pour se retrouver entre falaises, rizières, jungles, rivières, cascades, il y en a pour tous les goûts. « Il ne leurs manque que la mer pour que ce soit parfait » avait dit Ludo à notre arrivée. Aujourd’hui, nous pouvons affirmer « Ils n’en n’ont pas besoin ! » Ils ont déjà tant à offrir, car venir au Laos c’est découvrir une nature spectaculaire qui marque un voyageur. Â
Enivrés, nous l’avons été tout autant par les sourires – comme cette mamie dans notre pension familiale de Nong Khiaw qui s’est mis à jouer au foot avec Jonas et sa petite fille – des sourires généreux, des sourires qui vous disent « nous aimons partager » ; et barrière de la langue ou pas, croyez-moi les laotiens partagent !
Enivrée, je l’ai été ce soir-là à Luang Prabang. Au détour du marché de nuit, j’entends des chants – plutôt des prières – la nuit tombe, la rue du night market est animée mais ce chant est si captivant… C’est en m’avançant que je découvre ce temple derrière des stands, le Vat Mai. A l’intérieur, des moines bouddhistes, certains très jeunes, ils étaient en pleine prière. Comment vous dire qu’un spectacle pareil est unique, qu’on ne peut que s’asseoir et se laisser bercer par cette ferveur et cette sérénité, et je suis restée là assise…Â
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En quittant le Laos, nous avons encore en tête ce village visité dans le sud sur les conseils de Loïc, le gérant de notre guesthouse à Tad Lo. Et à charmé, régalé et enivré, nous pourrions ajouter interpelé.
 « Allez voir Captain Hook, il connaît beaucoup de choses ! Et son village est si particulier… » avait dit Loïc. Ni une ni deux, curieux que nous sommes, nous avions loué deux scooters et nous voilà parti à la découverte du village de Kok Phoung Tai, une visite qui restera gravée dans nos mémoires…
Si je vous dis mariée à 9 ans, première grossesse à partir de 13 ans, parfois 6 femmes pour un homme, abandonner son bébé en dehors du village s’il est considéré comme mauvais ; vous allez penser que je raconte des histoires.
Je vous assure que ce village existe. Un village autosuffisant d’environ 700 membres ; ils y cultivent le café, le manioc, vivent de leurs productions, n’achètent rien à l’extérieur si ce n’est parfois quelques vêtements et un scooter, achat en commun pour le village.
Un village animiste avec son lot de chamanes, de gourous et de magie blanche, noire ; ils ont même une forêt sacrée dans laquelle personne n’a le droit de pénétrer sauf les femmes qui sont sur le point d’accoucher. Elles doivent s’y rendre avec leur maman pour y mettre au monde leur enfant, parfois elle y reste plusieurs jours en attendant son arrivée parce qu’accoucher dans le village est un sacrilège…
Un village où presque tout le monde ne sait ni lire, ni écrire, ni parler le lao ; ils ont leur propre dialecte. « Les gens de mon village pensent que la Terre est plate et ils ne comprennent pas quand on leur dit qu’on l’appelle la Planète Bleue car d’en haut de l’arbre on ne voit que du vert et du marron… » nous explique Captain Hook.
Captain Hook parle très bien l’anglais, jeune il n’a pas voulu se résoudre à suivre les traditions de son village et a préféré le quitter pour aller faire des études à Vientiane. C’est la pression de ses parents et des gourous du village qui l’a ramené ici à l’âge de 21 ans. Captain Hook est un passionné de café « le petit Larousse de l’arabica » j’ai même envie de vous dire ; il a une très bonne connaissance aussi des plantes médicinales parce que vous l’aurez compris, ici personne ne va chez le médecin !
Il y a tellement encore de choses à dire sur ce village mais je ne le ferai pas car je ne veux pas gâcher la surprise des curieux comme nous qui voudraient s’y rendre 😉
Nous n’avons pas pu prendre d’autres photos du village, ni filmer, voici une vidéo que j’ai pu trouver sur internet qui vous en donne un petit aperçu :
https://villagemonde.com/explorationsolidaire/villagescoupdecoeur/laos/
Et l’école au Laos, c’est comment ?
C’est à Vang Vieng que j’en discuterai le plus avec Noé. Il nous apprendra que c’est la bandelette en bas de la jupe de l’uniforme des filles qui donne le niveau de la classe de l’élève. C’est marrant ai-je pensé. Mais cela ne marche que pour les filles 😊
L’école au Laos est gratuite nous avait-il précisé, les parents versent toutefois une participation de 50 000 Kip par mois, environ 5€, pour participer aux fournitures scolaires. « Mais vous savez le niveau ici est très bas » ajoute Noé.
Si une famille veut une meilleure éducation pour ses enfants, c’est l’école privée ; « mais là encore, c’est d’autres moyens… ! » se plaint Noé. Il faut payer 250 000 Kip par mois pour une école privée, « comment voulez-vous que le niveau change ?! Le salaire moyen ici au Laos est de 800 000 Kip, comment verser 250 000 Kip chaque mois pour n’envoyer qu’un seul enfant dans une bonne école !! » Noé est en colère.
« Regarde maman dans la cour, il y a le drapeau ici aussi ! » avait remarqué Lily. Au Laos, il y a le traditionnel levé du drapeau chaque lundi matin pour commencer la semaine, levé du drapeau que les élèves accompagnent en chantant leur hymne ; le drapeau est redescendu chaque vendredi après la classe. Oui, le rythme hebdomadaire est identique à celui de chez nous en France – enfin presque après nos derniers changements ! – les élèves vont à l’école du lundi au vendredi.
« Et tu crois qu’ils ont une journée où ils font le ménage à l’école ici aussi ? » m’avait questionné Jonas. « Oui Jonas ici aussi, les élèves participent à l’entretien de la classe et de l’école. Décidemment, que ce soit en Indonésie, au Cambodge ou encore ici au Laos, voir ces élèves nettoyer leur cour, leur classe et entretenir les extérieurs ne me parait pas dénuer de sens. Ils ont un rapport différent aux locaux qu’ils occupent. Â
Et nous dans tout ça, nous en sommes où ?
Un cinquième mois qui s’annonce en Asie dans un pays qui ne nous est pas si étranger, la Thaïlande. Que de souvenirs… Une petite crainte subsiste, 10 ans après, ne serons-nous pas déçu par un tourisme encore plus développé… ?
Côté santé, je me transforme moi-même en chamane maintenant. Dans ma sacoche, une bouteille de miel, un sachet de gingembre frais, une fiole de tee trea – en premier avant tout le reste comme dit Jonas, sinon c’est trop dégoutant ! – et une petite bouteille de propolis ; parfois quelques fourmis, non je plaisante là  😊 Honnêtement, cela fonctionne pour le moment.
Côté transport, et bien au Laos, cela aura été bus, tuk-tuk, bus, scooter, bus, long tail boat, bus et bus. Bon vous l’aurez compris, au Laos, on voyage en bus ! Pas de train (enfin pour le moment… Les chinois arrivent et sont en train de s’en occuper…) Ah si, petite nouveauté avec le sleeping bus ; nous découvrons durant notre trajet de nuit Salavane-Vientiane, un sleeping bus différent de ceux au Vietnam, les couchettes sont par deux. Donc si vous voyagez seul et bien vous avez un risque de passer la nuit avec un parfait inconnu ! Autant y être préparé 😉
Côté dépense Madame la Banquière… Silence…
Aïe, aïe, aïe… Le Laos fait mal au porte-monnaie. Ce ne sont pas tant les excursions que nous avons choisi d’y faire qui pèsent le plus sur le budget, seulement 15 %, ni l’hébergement 25 % – avec une dépense moyenne par nuit de 31€ pour une chambre à 4 – encore moins les transports avec seulement 15% mais alors il est passé où le budget ?!! … Dans nos assiettes ! La nourriture à elle seule a couvert 40% de notre budget mensuel. Ah oui quand même… On a très bien mangé au Laos 😉
Là ce soir Noé j’aurai envie de te dire que ta règle du voyageur des 3×8 a dérapé… Noé nous avait expliqué que lorsqu’il voyageait il s’attachait toujours à cette règle d’or : 8€/jour/personne pour le transport, la même chose pour l’hébergement et les repas ; ses dépenses ne devant pas dépasser ses 24€ alloués chaque jour. Ici au Laos, nous pourrons donc dire que nous sommes plus 4×8 que 3×8… avec une dépense moyenne journalière de 125€ à 4.
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Sur ces belles paroles, il est temps pour nous d’apprendre une nouvelle langue, de découvrir une nouvelle monnaie, une nouvelle culture, de nouveaux paysages et pourquoi pas quelques jolis temples ! – je repense à Jonas ce soir en notant cela « Si je pouvais faire un vÅ“u, je crois que je ne veux plus voir de temple de toute ma vie maintenant !! » – la Thaïlande nous attend avec son lot de belles promesses. A très vite pour vous les partager. 😊
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Que de belles photos… on ressent la sérénité jusqu en France!!!!
Bise à vous on attend la suite avec impatience!!!!
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Merci Aurelie ! Des bisous à vous 4 aussi.
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